COLONEL MOHAMED MELLOUKI
L’examen de la Loi de finances 2012 a, pour la première fois de
l’histoire de notre Parlement, braqué nos députés sur un ministre véritablement
puissant d’autant qu’il est tout aussi véritablement de l’ombre. Aucun n’avait
pu, auparavant, se hasarder à l’égratigner, parce qu’au-delà de sa fonction se
profile une sorte de stature de Législateur en chef. Vous l’avez sûrement
deviné, s’agissant évidemment du Secrétaire général du Gouvernement.
Subitement, ce n’est qu’après exactement cinquante années d’expérience
parlementaire que nos vaillants députés se sont rendus compte que son
département était, pour certains une véritable tombe, et pour d’autres un
frigidaire des lois. Ils ont demandé son départ, dans un élan rappelant quelque
peu le climat du M 20, comme si nos ‘honorables’ voulaient se faire pardonner
de ne pas avoir accompagné à temps ce Mouvement. Il n’en demeure pas moins que
cette réaction, même assez tardive sur une question aussi cruciale dans la vie
nationale mérite, nécessite même, qu’on s’y arrête. Pour s’interroger :
s’agit-il d’une question de compétence ou de retard dans la promulgation des
lois? Indéniablement que le palmarès juridique de l’intéressé est au dessus de
tout soupçon. Quant au retard, on peut avancer qu’il résulte d’un esprit
précautionneux qui prend en considération certains facteurs qui échappent aux
détracteurs. Je ne défends pas le ministre concerné. J’ai, au contraire,
brocardé l’intrusion de son département dans l’élaboration de la Loi des années
avant nos députés ; mais à la différence de ces derniers, j’ai imputé cette
anomalie au dysfonctionnement de l’Etat. En effet, à la page 87 de mon
Manifeste politique, arrêté en 2008, ( diffusé sur Google le 15 mars 2011, six
jours après le discours royal annonçant la Révision constitutionnelle) traitant
de la réalité du fonctionnement législatif j’y précise textuellement : « À cela
( c/ d’abord l’interférence royale) j’ajoute un acteur dont le rôle en matière
législative échappe totalement au commun des mortels, et probablement à nombre
de spécialistes du droit constitutionnel, qui vide totalement l’institution
législative de sa substance et ne lui confère en réalité qu’un rôle mineur,
sinon de façade seulement, dans l’élaboration des lois. Cet acteur relève
théoriquement exclusivement de l’Exécutif, mais c’est à lui en réalité que
revient le premier- et le dernier- mot tant pour les projets de loi que pour
les propositions. Il n’est autre que le Secrétaire général du Gouvernement.
C’est lui, en fait, qui pour les premiers textes décide de leur priorité,
définit et délimite leur teneur et juge du timing de leur envoi devant
l’instance législative. Après adoption par cette dernière, ces textes
reviennent à lui, qui juge de nouveau discrétionnairement de la suite à leur
réserver, soit les soumettre à promulgation soit y apporter des amendements
avant de les renvoyer pour une nouvelle lecture, soit tout simplement en
différer la promulgation, parfois pour quelques années, pour paraître dans une
nouvelle mouture. Les propositions de loi également ont beau être formulées par
les représentants de la Nation, finissent par atterrir sur son bureau, soumises
à son seul agrément. Ce responsable est le véritable décideur en matière
législative ; à côté le Parlement et le Conseil constitutionnel jouent le rôle
de marionnettes. Aucune autorité ne peut le contrecarrer, aucun texte de loi ne
passe s’il rechigne sur un mot. Même le Premier ministre ne peut oser entrer en
conflit frontal avec lui, d’autant que dans le contexte global du système politique,
bien qu’il relève statutairement du Gouvernement avec rang de ministre, il est
avant tout, et après tout, l’œil du Palais. S’il est une fonction dans le
Gouvernement qu’aucun Premier ministre pressenti ne pense à pourvoir, c’est
bien la sienne.» L’indignation de nos honorables contestataires conforte, donc,
mon appréciation que le Secrétariat général du Gouvernement fait, pratiquement,
office ‘de troisième Chambre législative’. Je souhaite, donc, qu’ils aient le
courage d’aller au bout de leurs opinions et de relancer le débat, plutôt, sur
un thème plus global, plus profond, celui de la revendication qui s’impose
réellement, celui de la Refondation de l’Etat, à laquelle j’appelle dans mon
Manifeste ci-dessus cité et en constitue précisément le titre, et qui doit
s’inscrire dans la perspective d’une ( nouvelle) révision constitutionnelle
puisque l’actuelle n’a été qu’un rafistolage de plus. Sinon leur levée de
boucliers revêtira l’allure d’une simple saute d’humeur, sans lendemain. Et le
ver demeurera
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